Analyser des tumeurs cérébrales en temps réel, lors d’une intervention chirurgicale : tel est l’objectif premier du projet de recherche collaborative baptisé ExtempoRMN1, associant des entreprises, des chercheurs de l’université et des médecins des Hôpitaux universitaires de Strasbourg.
Depuis 2007 déjà, le professeur Namer2 et le doteur Elbayed3 développent à Strasbourg, une nouvelle thématique de recherche : la métabolomique, c’est-à-dire l’étude des profils métaboliques de tissus sains ou malades, notamment de tumeurs. Ainsi, ils ont eu l’idée de comparer les profils métaboliques de patients atteints de cancers en créant une base de données d’envergure (projet CARMeN4). Pour ce faire un appareil à Résonance magnétique nucléaire (RMN) haute résolution en rotation à l’angle magique (HRMAS) a été installé au cœur même de l’hôpital de Hautepierre par la société Bruker Biospin, afin d’analyser sur place les échantillons de tumeurs prélevés au cours des opérations chirurgicales. Le docteur Elbayed a développé la méthodologie d’utilisation de l’appareil et les outils statistiques nécessaires. « Nous avons analysé des milliers d’échantillons puis établi et validé des modèles de classification de tumeurs pour différents types de cancers », explique-t-il.
À travers ce projet, les chercheurs ont fait la preuve que la métabolomique apporte des informations complémentaires à l’examen histopathologique et s’avère souvent plus fiable et plus prédictive en terme de pronostic, et permet d’affiner le diagnostic. « Aujourd’hui, nous sommes capables, dans certaines tumeurs, de détecter une mutation génétique corrélée à un profil métabolique en 30 minutes », souligne le professeur Namer. Au cours de ces dernières années, les partenaires du projet CARMeN ont donc mis au point un outil puissant, très efficace, facile d’utilisation et rapide à la fois dans la préparation même des échantillons qui peuvent rester à l’état solide, et dans l’acquisition puis le traitement, et l’analyse des résultats.
Pronostic davantage fiable et prédictif
Fort de cette avancée technologique, les deux scientifiques ont proposé de la rendre encore plus performante afin de l’utiliser pendant l’acte chirurgical lui-même. En neurochirurgie par exemple, il est primordial de pouvoir apporter en temps réel des informations pertinentes sur la nature des tissus que le chirurgien vient de prélever, afin de lui permettre de décider de la meilleure stratégie opératoire à poursuivre. C’est de ce constat qu’est né le projet ExtempoRMN qui vient d’être lancé. Ses objectifs : établir et/ou affiner un diagnostic en temps réel des tissus cancéreux prélevés, adapter au mieux le traitement à chaque patient mais aussi et surtout de s’assurer que tous les tissus cancéreux ont été retirés, ni plus ni moins – ce qui est capital lorsqu’il s’agit du cerveau. « Pour cela, il faudra être en capacité d’analyser 5 à 6 échantillons prélevés autour de la cavité opératoire afin de s’assurer d’une exérèse complète, en moins de 15 minutes par échantillons », explique le professeur Namer. L’idée est également de pouvoir projeter directement les résultats dans le système de neuronavigation utilisé par le neurochirurgien.
Défi industriel, scientifique et médical
Ce projet est un véritable défi industriel, scientifique et médical. Différents verrous technologiques devront être levés pour gagner en rapidité. « Cela passera par l’automatisation de tâches et l’optimisation des logiciels de traitement et d’analyse des données, tout en garantissant la fiabilité des résultats et leur reproductibilité », détaille le docteur Elbayed. Les quatre prochaines années seront consacrées à développer un outil optimal et à faire la preuve de son utilité sur le terrain. « Il s’agira de montrer que les informations données au chirurgien en temps réel lui sont utiles, influent sur son mode opératoire et améliorent la survie de nos patients », conclut le professeur Namer. Si tel est le cas, les trois dernières années du programme seront consacrées à étendre l’utilisation d’un tel équipement à d’autres CHU.
Anne-Isabelle Bischoff
1 Le projet associe les entreprises Bruker Biospin, Ariana Pharma. Pour en savoir plus sur le projet ExtempoRMN, voir le dossier de presse 2 Professeur de l'Université de Strasbourg et praticien hospitalier des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, rattaché à l'équipe Imagerie multimodale intégrative en santé du laboratoire ICube 3 Maître de conférences de l'Unistra, rattaché à l'équipe Imagerie multimodale intégrative en santé du laboratoire ICube 4 Pour Cancer RMN, projet de recherche collaborative lancé en 2007, voir Savoir(s) n°5 janvier 2010Comment un enfant dyslexique ou présentant tout autre trouble spécifique des apprentissages, se perçoit-il ? Quelle image construit-il de lui-même face à une société, un entourage ou des camarades qui ne comprennent pas forcément ce handicap « invisible » ? C’est la question centrale du programme de recherches lancé par deux enseignantes-chercheuses, Élisabeth Demont et Odile Rohmer, du Laboratoire de psychologie des cognitions (EA 4440). Pour y répondre, elles en appellent à la participation volontaire de nos enfants.
La dyslexie, la dyscalculie, et de façon générale tout ce que l’on nomme difficultés spécifiques des apprentissages, apparaissent très tôt dans la vie d’enfants d’intelligence normale et de tout milieu socio-culturel. D’origine neurobiologique, ces troubles s’avèrent souvent inattendus compte tenu des autres aspects du développement. « Par exemple, dans le cas de dyslexie, des parents, des enseignants se retrouvent face à des enfants futés, intelligents mais pour autant incapables d’apprendre à lire », illustre Élisabeth Demont. Si les facteurs environnementaux ne sont en aucun cas à l’origine de ces troubles, ils peuvent cependant y contribuer : l’attitude de l’entourage peut notamment aggraver ou compliquer la situation des enfants présentant de telles difficultés. « Souvent en absence de diagnostic ou faute d’informations suffisantes, on pense être face à des enfants paresseux, qui ne font pas d’efforts, ne se concentrent pas, etc. et eux-mêmes risquent à terme d’avoir cette perception », ajoute la chercheuse.
Les enfants dyslexiques se dévalorisent à tort
« Le plus souvent, ils mettent en place des stratégies compensatoires en classe pour que l’on ne se moque pas d’eux. Par exemple, ils peuvent préférer faire le pitre et ce sont les troubles du comportement que l’on relève. » Une attitude inadaptée de l’entourage peut conduire à une souffrance de l’enfant, pouvant se traduire par une baisse de l’estime de soi et/ou un sentiment de peu d’utilité sociale. Les tous premiers résultats des travaux des deux chercheuses suggèrent que les enfants présentant des troubles spécifiques des apprentissages se dévalorisent et se perçoivent comme moins compétents et faisant moins d’efforts que les autres. « La finalité de notre programme de recherches commun est de remédier à cela si ces résultats se confirment, souligne Odile Rohmer. Il en va de leur réussite scolaire et de leur intégration scolaire et à plus long terme sociale et professionnelle ! »
Un jeu informatique pour décrypter l’image que les enfants ont d’eux-mêmes
Comprendre le retentissement des troubles spécifiques des apprentissages sur l’image que les enfants se construisent d’eux-mêmes est un thème novateur qui n’a jamais été abordé. « Pour répondre à cette question de façon rigoureuse et contrôlée, nous avons mis au point un protocole unique et original. Nous avons construit un jeu informatique nous permettant d’interroger les enfants sous une forme ludique. Il ne s’agit en aucun cas d’une évaluation scolaire », explique Odile Rohmer. Cette nouvelle méthode expérimentale a pour objectif d’éviter que les réponses des enfants ne soient influencées par les valeurs sociales et les normes qui lui sont inculquées. « On veut éviter que les enfants répondent en fonction de ce que l’on attend d’eux en tant qu’élèves. C’est ce qui transparait lorsque l’on utilise des méthodes plus classiques de questionnaires », ajoute Odile Rohmer.
Des enfants de 7 à 12 ans pour participer à une étude originale
Aujourd’hui, les deux scientifiques font appel à leurs collègues travaillant au sein de l’université, parents d’enfants âgés de 7 à 12 ans avec ou sans difficultés spécifiques des apprentissages qui seraient volontaires pour participer à cette étude. « Notre méthode nécessite des conditions strictes qui permettent de contrôler le temps de réponse, de s’assurer de la spontanéité des réponses et d’éviter toute distraction ou influence. C’est pourquoi nous avons besoin que les enfants viennent au sein de la plateforme de psychologie, dans des locaux dédiés. Nous ne pouvons pas aller dans les classes, détaille Élisabeth Demont. C’est ce qui rend plus difficile la mise en place de notre étude et c’est la raison pour laquelle nous sollicitons aujourd’hui tous les parents de la communauté universitaire. »
L’étude se déroulera de janvier à fin mars. La durée de la passation est d’une vingtaine de minutes. Les parents et enfants intéressés peuvent s’adresser dès à présent par courriel à Élisabeth Demont ou Odile Rohmer.
Anne-Isabelle Bischoff
Le cancéropôle du Grand-Est renouvelle en 2014 son prix de master en sciences humaines et sociales / épidémiologie et son appel à candidatures pour le soutien à la participation à des formations en rapport avec la recherche translationnelle sur le cancer.
Lancé en 2013, le prix de master en sciences humaines et sociales (SHS) / épidémiologie a permis de récompenser trois jeunes chercheurs pour leurs travaux en SHS ou en épidémiologie sur les problématiques du cancer (voir résultats). Pour l'année 2014, deux prix d'un montant de 1 000 euros et de 500 euros seront attribués. Peuvent candidater les étudiants titulaires d’une inscription en master 2 pour l’année universitaire en cours dans un établissement supérieur situé dans l’une des 5 régions du Grand-Est, en anthropologie, droit, économie de la santé, épidémiologie, épistémologie, ethnologie, géographie, histoire, linguistique, philosophie, psychologie, santé publique, sociologie, statistiques, etc. et rédigeant un mémoire de master 2 portant sur les problématiques posées par le cancer.
La soumission des dossiers se fait en deux temps : dépôt de la candidature comprenant notamment un bref exposé de la recherche en cours ou envisagée avant le 28 février 2014 et dépôt du mémoire de master pour les étudiants sélectionnés lors de la première étape avant le 15 juillet 2014.
500 euros d'aides financières
Concernant le soutien à la participation à des formations en rapport avec la recherche translationnelle sur le cancer, l'appel à candidatures est ouvert à toute personne issue d’une des cinq régions du Grand-Est ayant le projet d’intégrer une formation universitaire de niveau master 2 Recherche ou de troisième cycle (DU, DIU), ou autre formation spécialisée, portant sur des disciplines biomédicales concernées par la recherche sur le cancer. Ces aides financières d’un montant forfaitaire de 500 euros chacune pourront servir à couvrir les frais d’inscription à la formation, ainsi que d’éventuels frais de déplacement et d’hébergement.
Pour les formations ayant lieu durant l’année universitaire 2014-2015, la sélection se fera parmi les dossiers reçus au 26 septembre 2014 dernier délai.
Les modalités d’accueil et le dossier de candidature (première demande ou renouvellement) sont disponibles sur le site du CNRS. Les candidatures (au format pdf, taille maximale 10 Mo, identifié comme suit : NOM_Prénom.pdf) munies de l’avis du directeur de l’unité d’accueil, et, en cas de mobilité, de celui du directeur de l’unité d’affectation, seront collectées par la composante. Celle-ci fixera et communiquera aux enseignants-chercheurs la date limite de dépôt des dossiers.
Présenter un travail de recherche en trois minutes, ceci pour un public de tous horizons avec comme seul support un visuel fixe. Ce sont là les contraintes d’un nouveau concours proposé par le Jardin des sciences et exclusivement ouvert aux doctorants de l’Université de Strasbourg.
L’exercice se veut délibérément loin des rendus habituels des doctorants qui se déroulent le plus souvent dans un cercle disciplinaire précis. Exercice de vulgarisation, de synthèse, de mise en valeur d’un projet, découvertes de nouvelles possibilités d’expression autant de points qui peuvent d’une part permettre de « sortir la tête du guidon » et également de mettre en avant de nouvelles compétences. Une proposition qui entre par ailleurs dans le programme des formations transversales des doctorants.
Conformément à ses missions de service public, l'Université de Strasbourg promeut la diffusion de la culture, de l'information scientifique et de la recherche. A cette fin, elle entend faciliter la publication des travaux des équipes de recherche en soutenant les projets d'édition des chercheurs dans l'ensemble des domaines d'enseignement et de recherche de l'université.
Après évaluation des projets, ce soutien se traduit par l'octroi d’une aide financière à publication. Celles-ci sont attribuées par la commission recherche, sur proposition du conseil de publication, que les auteurs s'adressent pour leur projet éditorial à la Fondation Presses universitaires de Strasbourg ou à un autre éditeur.
Le conseil de publication tient deux sessions par an consacrées à l'évaluation des manuscrits et au soutien financier de la commission recherche.
Session 1er semestre 2014 : date limite de dépôt des dossiers : vendredi 21 février 2014 ; décision : juin 2014.
Session 2nd semestre 2014 : date limite de dépôt : lundi 29 septembre 2014 ; décision : décembre 2014.
La version anglaise de l'ouvrage Le champ de l'eurocratie. Une sociologie politique du personnel de l'UE, dirigée par Didier Georgakakis et Jay Rowell, vient de paraître aux éditions Palgrave Macmillan sous le titre The field of eurocracy. Mapping EU actors and professionals.
« L’Eurocratie » : le mot existe dans toutes les langues et les alphabets de l’Union européenne. Mais par-delà les représentations plus ou moins fantasmées que ce mot véhicule, que sait-on des parlementaires, commissaires, fonctionnaires, représentants permanents, lobbyistes et représentants d’intérêt, membres du Conseil des gouverneurs de la Banque centrale, patrons et syndicalistes, militaires et diplomates, commentateurs et communicateurs, qui, au sein ou en lien étroit avec les institutions de l’UE, donnent corps à la chose ? Quels sont leur carrière, leur trajectoire sociale et professionnelle, le type d’autorité dont ils sont investis ou pour lequel ils luttent, et quelle place y tient l’Europe ? Comment se structure enfin le collectif qu’ils forment ensemble, dans sa diversité comme dans son unité sociologique relative ?
Premier ouvrage aussi exhaustif sur cette population, ce livre collectif donne des éléments de réponses à ces questions en mobilisant les démarches originales qui, aux États-Unis comme en Europe, renouvellent les approches de l’intégration européenne en recourant à la notion de champ social. Utile tout aussi bien aux professionnels de l’Europe qu’aux citoyens, ce livre bouleverse la représentation classique des institutions européennes et jette un éclairage nouveau sur les structures relationnelles de leur fonctionnement.
Jay Rowell est directeur de recherche au sein de l'unité de recherche Sociétés, acteurs, gouvernement en Europe (Sage - UMR 7363).
Didier Georgakakis, membre de l’Institut universitaire de France, est professeur de science politique et titulaire de la chaire Jean-Monnet de sociologie politique européenne à l’Institut d’études politiques de l’Université de Strasbourg (Gspe-Prisme) et visiting Professor au Collège d’Europe de Bruges.
Les Biatss au 1er janvier 2013
Envoyez votre info à lactu@unistra.fr avant le mercredi 22 janvier midi pour une parution le vendredi 24 janvier 2014. Consultez les dates des prochains numéros.